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Chronique Lecture | Les Aiguilles d’Or, de Michael McDowell

Couverture du livre Les Aiguilles d'Or de Michael McDowell

Résumé des Aiguilles d’Or

Dans le New York de la fin du XIXe siècle coexistent deux mondes que tout oppose mais à peine séparés d’un coup de pistolet. D’un côté, l’opulence et le faste, les draperies soyeuses, les bijoux sertis et les sels parfumés. De l’autre, l’alcool frelaté et les jeux truqués, le vice monnayé, l’air saturé d’opium et la nudité corrompue.

C’est à la frontière indistincte entre les deux, au cœur de l’infâme Triangle Noir et ses quelques kilomètres carrés de vices, qu’une famille fortunée va machiavéliquement chercher à asseoir sa notoriété en faisant mine de débarrasser la ville de sa corruption.

Les Stallworth, dirigés d’une main de fer par leur patriarche, James Stallworth, influent et cruel juge, assisté de son fils Edward, pasteur presbytérien aux sermons incendiaires, et de son gendre Duncan Phair, jeune avocat à la carrière prometteuse, ont un plan implacable : déraciner le mal en éradiquant purement et simplement une lignée corrompue de criminelles, les Shanks.

Avec la complicité d’une presse prête à tout pour vendre du papier, d’une justice partiale et expéditive et de la peur viscérale qu’inspirent les déclassés, une machinerie infernale va se mettre en branle et n’aura de cesse que lorsqu’elle aura réduit sa cible en poussière. Seulement attention, à New York en 1882, la mort rôde quel que soit le quartier, toujours prête à frapper.

À mi-chemin entre un roman social et un roman à sensation, avec une touche de Dickens et un soupçon de Sweeney ToddLes Aiguilles d’or brille par sa compréhension de la nature humaine et frappe par son écriture puissamment cinématographique. Le récit de cette lutte des classes, des pouvoirs et des sexes, tissé avec une précision aussi historique que diabolique, fait naître un plaisir presque coupable grâce à un savoureux mélange de justesse, d’authenticité et de démesure.

Éditions Monsieur Toussaint Louverture

Fiche technique

Titre Les Aiguilles d’Or

Auteur : Michael McDowell

Édition – Collection : Monsieur Toussaint Louverture – Bibliothèque Michael McDowell

Nombre de pages : 520

Date de parution : 06.10.2023

Âge : À partir de 17 ans

Prix : 12.90€

Remarque : J’ai lu ce livre dans le cadre de l’édition 2023 du Pumpkin Autumn Challenge.

Mon avis sur Les Aiguilles d’Or

Je crois que Les Aiguilles d’Or était l’une de mes lectures les plus anticipées de cet automne. J’étais tellement impatiente que je n’ai pas attendu plus de quelques jours avant de m’y lancer, la semaine précédant Halloween. Et Michael McDowell a encore une fois montré tout son talent d’auteur avec ce roman que j’ai adoré ! Il faut dire que je n’en attendais pas moins du créateur de la désormais célèbre saga Blackwater

Les Aiguilles d’Or, un roman noir que j’ai adoré

J’avoue ne pas être immédiatement tombée sous le charme des Aiguilles d’Or, ayant trouvé le début très étrange. Il m’a fallu un petit temps d’adaptation face à l’ambiance et au ton employé, d’autant plus que le début du roman mouline un peu dans la semoule. Mais une fois les 30% passés (environ 150 pages), la mayonnaise a pris – et je n’ai alors plus été capable de lâcher ma liseuse.

Les Aiguilles d’Or est une petite brique qui renferme la puanteur et l’hypocrisie de personnages chez qui il n’y a rien de bon à tirer. Les deux familles que nous rencontrons, les Stallworth et les Shanks, sont aussi réprimables l’une que l’autre… Et c’est justement ce que j’ai tant apprécié dans ce roman : Il assume de ne pas faire de concessions.

Nous plongeons ainsi dans une histoire sombre, sordide, violente et pleine de vices où les personnages oscillant entre la volonté de bien paraître dans la société, d’asseoir leurs pouvoirs, de se venger d’évènements dont ils ont été victimes… Et pour cela, tout (absolument tout) est permis.

Gif en noir et blanc d'une femme au visage effrayé, pour illustrer ma chronique des Aiguilles d'Or de Michael McDowell.

Michael McDowell revient avec les mêmes qualités qui m’avaient tant charmée dans Blackwater : Une écriture fluide et espiègle, une modernité dans les thématiques traitées pour l’époque (le roman a été publié en 1980), et un féminisme absolument délectable – je ne crois pas que beaucoup d’auteurs auraient osé (ou même pensé à) créer un gang uniquement constitué de femmes… Mais Michael McDowell a osé, et le pari est plus que réussi !

J’insiste sur le fait que Les Aiguilles d’Or n’est pas un roman à mettre entre toutes les mains étant donné tout l’étalage de violence dont il fait preuve. On frôle par moments le roman d’horreur. Alors âme sensible s’abstenir !

En bref

En bref, Les Aiguilles d’Or de Michael McDowell est un roman que j’ai adoré. Sombre, sordide et vicieux, il nous plonge au plus profond de la noirceur humaine. C’est violent et sans concession, et ça file vraiment les jetons. Tout cela est exacerbé par le talent de l’auteur qui nous offre une histoire à l’écriture fluide et espiègle, à la modernité certaine dans les thématiques traitées, et au féminisme absolument délectable.

Ma note

Ma note : 16/20

La citation des Aiguilles d’Or

Edward Stallworth se moquait parfois un peu de cette paroissienne, mais Helen avait été attirée par l’inébranlable fidélité exprimée par l’habit de cette femme. Elle ne la trouvait pas du tout lugubre, mais plutôt d’une nature sombrement joyeuse. Elle avait assez d’argent pour vivre à son aise dans un quartier modestement distingué, dans une maison de taille modeste qui, à la surprise de Helen quand elle rendit pour la première fois visite à cette dame pétrie de modestie, était pourvue d’une véritable foule de domestiques.

Plus étonnant encore que leur nombre, était le fait manifeste que chacun d’entre eux était estropié d’une manière ou d’une autre. L’homme qui ouvrit la porte à Helen n’avait pas de bras droit, ce qui ne l’empêcha pas, d’un ample mouvement tourbillonnant, de la débarrasser avec adresse de sa cape. La bonne qui faisait la poussière dans le petit salon à l’avant était bossue, et la jeune fille qui montait une pile de tentures dans l’escalier avait d’horribles cicatrices sur le visage. Le domestique à la tenue impeccable et au joli sourire qui apporta les gâteaux et le thé n’avait que deux doigts à chaque main, et la première fois que Helen emprunta le fiacre de Madame Taunton, elle se rendit compte que les deux valets de pied qui les convoyaient à l’arrière n’avaient qu’une seule paire de jambes, équitablement répartie entre eux.

Quand Helen fut suffisamment proche de Madame Taunton pour faire une remarque sur ces particularités, cette dernière répondit avec un soupir : “Mon époux n’avait qu’une seule jambe, vous savez, et notre brève vie commune fut si pure et merveilleuse que je me suis juré à sa mort de ne jamais épouser un homme complet. Cette idée me dégoûtait, en fait, et je considérais à l’époque que je n’aurais aucun mal à me dénicher un nouveau mari, tant les blessures de guerre avaient fleuri lors des premières années de mon deuil. Mais je n’ai jamais trouvé personne qui me convienne aussi bien que le veuvage, et c’est ainsi que j’ai renoncé à vivre avec quelqu’un et que j’ai conservé ma tenue de deuil.

– Mais, et les domestiques… ? lui rappela doucement Helen.

– Ah oui, bien sûr, ils sont tous mutilés, comme vous l’avez probablement remarqué. Jamais je n’embaucherai un homme ou une femme qui ne soit pas estropié. Non seulement ils me rappellent avec une constante tendresse l’infortune de mon mari, mais je trouve qu’ils sont invariablement de meilleurs travailleurs que les autres, dont les corps sont peut-être intacts mais dont les esprits sont remplis de vilenie et d’ingratitude. Et à quoi bon employer quelqu’un qui pourrait trouver du travail n’importe où ? Ces hommes et ces filles que je garde près de moi auraient la vie dure s’ils n’étaient pas à mon service, et ils le savent. Ils sont reconnaissants et ce sont mes enfants. J’en ai adopté autant que mon revenu me le permet et j’ai pour opinion que mon argent est mieux utilisé ainsi que si je le dépensais dans des luxes superflus.

– Eh bien, répondit Helen avec émotion – mais seulement après le départ de la bonne qui n’avait qu’un œil -, je m’étonne que davantage de gens ne suivent pas votre exemple.”

Michael McDowell, Les Aiguilles d’Or

Le mot de la fin

C’est la fin de cette chronique lecture qui, -certes- ne respire pas vraiment la joie de vivre, mais a au moins eu l’avantage de me faire vivre des moments forts en émotions.

Si ce roman te semble justement un peu trop hard pour ce que tu peux supportable, je t’encourage à aller lire mes avis sur d’autres histoires de Michael McDowell bien plus accessibles que celle-ci :

En attendant de te retrouver là-bas, je te souhaite un bon mercredi et une excellente fin de semaine !

Les Aiguilles d’Or est un roman qui te tente ? Tu es curieuse de découvrir les écrits de Michael McDowell ?

À bientôt pour un nouvel article !

Amandine Stuart

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