Couverture du livre J'ai vu Sisyphe heureux de Katerina Apostolopoulou

Résumé de l’éditeur

Une famille de pêcheurs dont le père disparaît en mer, un couple de gens modestes que la mort vient séparer, un homme seul qui abandonne maison, papiers d’identité et biens matériels pour vivre en vagabond sous les étoiles… Trois poèmes narratifs. Trois destins aux prises avec la vie. Trois histoires simples pour dire la fierté du peuple grec. Ce ne sont pas les héros des batailles homériques que chante Katerina Apostolopoulou dans ce premier recueil écrit en deux langues, le grec et le français, mais le courage des êtres qui placent l’hospitalité et la liberté au-dessus de tout, qui se battent avec les armes de l’amour et de la dignité, qui ont peu mais donnent tout. À l’heure de la crise économique et du concept de décroissance, une voix venue de Grèce nous invite à voir Sisyphe heureux.

Éditions Bruno Doucet

Fiche technique

Titre J’ai vu Sisyphe heureux

Autrice : Katerina Apostolopoulou

Édition – Collection : Bruno Doucet – Jeunes plumes

Genre : Poésie

Nombre de page : 120

Date de parution : 28.05.2020

Âge : À partir de 10 ans

Prix : 15.00€

Récompense : Pépite Fiction Ados 2020

Remarque : J’ai découvert ce livre grâce à une rencontre VLEEL de Serial Lecteur Nyctalope.

Mon avis

En janvier, Serial Lecteur Nyctalope avait invité les Éditions Bruno Doucet à participer à l’une de ses rencontres VLEEL. C’est à cette occasion que j’ai découvert leur amour pour la poésie. Amour qu’il m’ont d’ailleurs transmis rien qu’avec leurs mots. Alors, quand je leur ai demandé quel titre de leur catalogue ils conseilleraient à une personne voulant avoir une première expérience poétique, ils m’ont répondu : J’ai vu Sisyphe heureux de Katerina Apostolopoulou.

J’ai donc attendu la dernière semaine de mars pour m’y plonger (ne me demande pas pourquoi, je n’en sais rien). Sachant que j’avais déjà lu La Tête hors de l’eau de Lili Reinhart en décembre dernier, et Je suis l’ennemie de Karianne Trudeau Beaunoyer tout récemment.

Ne me restait plus qu’à savoir si J’ai vu Sisyphe heureux a su me communiquer la même passion que les Éditions Bruno Doucet… Je te dis ça tout de suite !

En général

Ce fut une lecture en demi-teinte, et même si je ne suis pas sûre de savoir pourquoi, je vais quand même essayer de t’indiquer les points qui me paraissent être les plus importants.

Le premier est totalement de mon fait : Vu que c’était une recommandation chaleureuse, je n’ai pas vraiment lu le résumé de l’éditeur. Chose qui ne m’arrive jamais. Et donc, je n’ai pas vu que J’ai vu Sisyphe heureux n’était constitué « que » de 3 poèmes d’une longueur plus que respectable. J’ai donc été déstabilisée de voir que le premier durait des pages et des pages (une vingtaine je pense). C’est bizarre lorsque tu as l’habitude de lire un poème par page. Mais j’ai fini par comprendre que Katerina Apostolopoulou avait souhaité nous partager des nouvelles poétiques. Et à partir de là, j’étais partie.

Mais du coup, c’est vrai qu’il m’a manqué un peu de matière. Quand j’ai refermé le livre, je me suis presque dis « C’est tout ? » Mais là encore, je pense que c’est dû au fait d’être habituée à lire plusieurs dizaines de poèmes en un seul et même recueil. Alors qu’en réalité, la quantité doit être sensiblement la même.

J’ai en revanche été assez sensible à la notion d’amour, de liberté et d’émancipation qui représente le fil d’Ariane de J’ai vu Sisyphe heureux. Si je devais classer ces poèmes dans un ordre de préférence, je dirais 2-3-1.

Le premier, intitulé « Cette maison n’a besoin de rien », nous peint le quotidien d’une famille de pêcheurs dont le père vient de mourir en mer. La mère et ses enfants doivent alors affronter le travail de deuil, tout en retournant affronter les vagues qui leurs ont tout pris pour continuer à se nourrir, et en restant extrêmement dignes et fiers face à la compassion des habitants du village.

Le second poème, « Comme une grande journée d’été », retrace la vie d’un couple, de leur rencontre jusqu’à leur mort. J’ai particulièrement été touchée par ce récit qui nous démontre que la vie n’a pas à être faite d’incroyables aventures pour être magnifique : le quotidien et la simplicité suffisent. C’est quelque chose que je trouve encore trop rare dans la littérature.

Quant au dernier poème, « Le centaure de notre enfance », il prône que l’on peut tout à fait se positionner en dehors de la société telle que nous la connaissons et être heureux. Celui-ci avait, encore plus que les autres, un joli goût de mythe, de légende difficilement explicable.

Et je crois qu’au fond, toutes ces histoires étaient en fait des petits contes qui avaient tous l’ambition de nous donner les clefs de philosophies de vie.

En revanche, et c’est peut-être là encore de ma faute, j’ai trouvé l’écriture un petit peu trop simple à mon goût. Mais étant donné que J’ai vu Sisyphe heureux a remporté le prix « Pépite Fiction Ados 2020 » au Salon du Livre de Paris pour la Jeunesse, je ne devrais pas être étonnée que la plume soit très narrative et limpide. Il n’y a pas vraiment d’images ou de figures littéraires qui auraient permis de laisser un peu plus libre court à notre imaginaire. Les vers n’avaient pas de rimes, et dans l’absolu ça ne me dérange pas (comme je l’ai dit avec La Tête hors de l’eau de Lili Reinhart). Mais je pense que tous ces éléments se sont accumulés pour se transformer en points gênants et faire de cette lecture quelque chose de légèrement fade.

Après, il est vrai que j’avais demandé aux Éditions Bruno Doucet un recueil qui permettrait d’avoir « une première expérience poétique ». Et à ce titre, il est vrai que cette oeuvre conviendrait très bien à de jeunes lecteurs voulant se familiariser avec le genre. Je pense simplement que J’ai vu Sisyphe heureux contrastait trop avec la profondeur, la maturité et la noirceur des recueils que j’ai déjà pu te présenter sur le blog.

En bref

En bref, le recueil de poèmes J’ai vu Sisyphe heureux de Katerina Apostolopoulou a la particularité de nous présenter trois longs écrits au lieu de la floppée à laquelle le genre a pu nous habituer. Les thèmes et notions qui y sont traités n’en restent pas moins percutants et importants pour entrevoir la vie différemment. J’ai cependant trouvé la plume de l’autrice un peu trop claire par rapport à ce que j’ai déjà pu lire. Mais tous ces points font indéniablement de cette oeuvre un choix sûr pour faire découvrir la poésie aux plus jeunes d’entre nous, en particulier les adolescents.

Ma note

Ma note : 12/20

Les 4 poèmes

Avant de commencer un nouveau livre qui m’intéresse j’aime aller checker quelques citations pour voir si le style d’écriture me plait. Voici donc quatre poèmes (au lieu des cinq habituels, mais ceux-ci sont particulièrement longs). Libre à toi de les lire ou pas, suivant si tu aimes bien savoir dans quoi tu t’engages ou si tu veux garder le total plaisir de la surprise.

Dans la nuit

Alors que tout le monde dormait

Maria s’est levée

S’est préparée

Elle a fait son lit

S’est installée tranquillement dans le fauteuil

La mort rôdait encore dans la maison

Maria

A tendu les bras

Et avec ses doigts tordus par les années

Lui a fait signe de venir

La mort est montée sur ses genoux

Maria l’a serrée contre son coeur

Ses filles l’ont trouvée ainsi

Assise dans son fauteuil

Endimanchée

Sereine

Les bras croisés

Dans une étreinte

Au cas où

Il serait vrai

Que les âmes se retrouvent.

KATERINA APOSTOLOPOULOU, J’AI VU SISYPHE HEUREUX

Quand je retourne au pays

Je passe toujours devant chez eux

Et à chaque fois ça me surprend

Le trottoir nu souligne leur absence

Quatre murs seuls qui tournent au gris

Gonflés d’humidité comme s’ils retenaient des larmes

Et une petite cour déserte collée au mur de la maison voisine

Il fallait bien du talent pour en faire un paradis

Leur départ

Signe la fin d’un monde

Vivre pauvre sans être rustre

Avoir peu et tout offrir

Garder le meilleur pour l’ami ou l’étranger

Reprendre tous les matins le même chemin

Savoir que toute la vie sera ainsi

Et en sourire

Moi

J’ai vu

Sisyphe heureux.

KATERINA APOSTOLOPOULOU, J’AI VU SISYPHE HEUREUX

Où est ta maison, Fotis ?

Ici

Et là-bas

Je tourne avec la terre et les étoiles

Je dors dans vos sourires.

KATERINA APOSTOLOPOULOU, J’AI VU SISYPHE HEUREUX

On était seuls

Dans un espace infiniment plus grand

Que le monde que l’on connaissait

« Regardez », a-t-il murmuré

Il a tendu les bras

Et la pleine lune

Énorme comme une orange bien mûre

Est apparue derrière la mer

On ne pouvait plus dire avec certitude

Si c’était la lune qui se levait

Ou la mer qui descendait

Pour la dévoiler

D’un seul coup

Hélène s’est levée

Elle est partie sans dire un mot

Comme si quelqu’un lui avait donné un ordre

Le lendemain

Elle m’a dit des larmes dans les yeux

Qu’elle avait senti la mer monter en elle

Que Fotis avait tout orchestré

La disparition de la ville

Le silence

Même le lever de la lune

Qu’il aurait même pu

Faire retomber la lune dans l’eau

Qu’elle s’y fondrait à jamais

Que le monde se briserait

Si elle était restée une minute de plus

M’a-t-elle dit

Elle n’aurait su comment marcher

Pour rentrer chez elle

KATERINA APOSTOLOPOULOU, J’AI VU SISYPHE HEUREUX

Le mot de la fin

Je sais que ça fait deux articles de poésie qui sont publiés en peu de temps, mais c’est quelque chose que je prends de plus en plus de plaisir à découvrir !

Enfin, j’ai maintenant beaucoup de romans (et autres) qui attendent que je les présente, alors il ne devrait pas y avoir de poésie ici avant quelques temps. D’ailleurs, le prochain article sera un magnifique coup de coeur ! Hâte ?

Alors, à bientôt pour un nouvel article !

Amandine Stuart

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