Résumé de l’éditeur
Dans Héroïques, Inna Shevchenko rend hommage à toutes les femmes, figures historiques ou fictionnelles, qui l’ont aidée à se défaire des carcans de la société patriarcale.
Certaines, comme Sailor Moon ou Maria Botchkareva, lui ont fait comprendre que les femmes ne sont pas le sexe faible. D’autres, comme Ève, l’ont incitée à rejeter la morale religieuse sexiste et à mordre dans le fruit de la connaissance. Inès Armand, Nellie Bly et bien d’autres, journalistes, ingénieures ou politiques, lui ont prouvé que les femmes sont aussi talentueuses que les hommes et méritent de faire entendre leur voix.
Avec ce récit tant personnel qu’engagé, Inna Shevchenko nous entraîne sur les traces des modèles féminins grâce auxquels elle a forgé ses convictions et nous invite à rejoindre la révolution des femmes.
Fiche technique
Titre : Héroïques – Amazones, pécheresses, révolutionnaires
Autrice : Inna Shevchenko
Édition – Collection : Les Échappés – Essais, récits, témoignages
Genre : Essai
Nombre de page : 160
Date de parution : 16.05.2019
Âge : À partir de 16 ans
Prix : 17.50€
Remarque : J’ai lu ce livre dans le cadre de ma participation au challenge Autrices au monde, le pays mis à l’honneur en ce mois de Mars 2022 étant l’Ukraine.
Mon avis
C’est tout naturellement que le challenge Autrices du monde a dédié ce mois de Mars 2022 à l’Ukraine, compte tenu de l’horreur qui se joue là-bas 💙💛.
Mais comme je ne souhaitais pas me plonger dans un livre sur l’histoire compliquée entre l’Ukraine et la Russie (parce que j’avais besoin que mon moral soit un peu épargné après ce qu’on voit tous les jours à la télé), je me suis penchée sur un ouvrage féministe qui m’a beaucoup plu.
Héroïques – Amazones, pécheresses, révolutionnaires m’a d’abord permis de découvrir son autrice, Inna Shevchenko, que je ne connaissais pas du tout et qui est pourtant une figure emblématique du féminisme (cause que je défends et qui me tient à cœur). Née et élevée en Ukraine, Inna Shevchenko, devient féministe activiste auprès du mouvement Femen dont elle deviendra une personnalité de premier ordre, ce qui lui vaudra d’être enlevée et torturée par le KGB. Elle trouve alors en 2012 asile en France où elle réside aujourd’hui et continue à développer Femen à l’international via de nombreuses actions militantes (manifestations, discours, conférences, évènements politiques et sociaux, écrits, …).
Ce livre constitue justement une de ses actions où elle nous présente les héroïnes qui ont marqué sa vie, l’ont fait évoluer et ont participé à la faire devenir ce qu’elle est aujourd’hui. Ces pages sont donc peuplées de femmes aussi éclectiques que des journalistes, des personnages de films, de romans ou de dessins animés, des autrices, des figures politiques, de la famille d’Inna Shevchenko, des gens qu’elle a rencontré et qui l’ont marquée, ou même d’anonymes qui n’ont fait que laisser une trace de leur passage.
Ce fut pour moi une magnifique occasion d’apprendre. Il y avait bien sûr des noms et des figures que je connaissais bien, mais la plupart m’étaient totalement inconnues. Soit parce qu’elles étaient trop éloignées de ma culture, soit… parce qu’on a fait en sorte que je n’en entende pas parler ? C’est en tout cas la pensée qui m’a traversée plusieurs fois, notamment lorsque l’autrice reprend des idées que j’avais déjà lues cet hiver dans l’essai de Titiou Lecoq : Les Grandes Oubliées. Et comme alors, je n’ai pu qu’être frappée par un tel effacement de masse, qui ne fut en aucun cas naturel.
Mais passons, parce que sinon je vais faire une chronique ultra énervée, ce qui ne donnera rien de bon. Je voulais simplement dire que ce livre nous permet de traverser un champ impressionnant de femmes qui sont un peu devenues mes héroïnes par procuration, rien que grâce aux mots d’Inna Shevchenko. Ça à par exemple été l’occasion de voir passer le nom de Marina Tsvétaïéva, autrice russe dont j’avais lu deux pièces de théâtre pour le challenge Autrices du monde de Janvier : La Tempête de neige et Une Aventure.
Il ne faudrait pas croire que ce livre n’est qu’une liste de noms, parce que c’est bien plus que ça. Et c’est précisément cela qui rend très difficile la catégorisation de cet ouvrage à la limite entre non-fiction, témoignage, essai, autobiographie, biographie, programme et manifeste féministe. Parce qu’il regroupe un peu de tous ces genres. L’autrice nous parle ainsi beaucoup de sa vie, de ce qu’elle a vu et vécu, mais nous offre aussi toute une historiographie du mouvement Femen, ce qui est alors l’occasion pour elle de nous exposer l’état du féminisme et comment il a évolué, en insistant sur tout ce qui reste à faire et ce qui devrait changer.
Certes, tout ce qu’elle explique dans ces lignes n’est pas toujours novateur (c’est même souvent quelque chose que j’ai déjà entendu plusieurs fois), mais ce n’est pas grave puisque qu’il suffit de lever les yeux pour voir que ces simples réclamations de bon sens n’ont toujours pas été entendues. C’est donc qu’il faut continuer de les répéter.
En revanche, d’autres idées ont été beaucoup plus inédites pour moi et m’ont permis de réfléchir au féminisme dans des dimensions différentes, que je n’avais pas encore bien imaginées, en particulier lorsqu’il se met en relation avec la religion. C’est pour cela que je tiens à appuyer sur un genre particulièrement important qui constitue ce livre : celui du manifeste/programme féministe que je ne m’attendais pas forcément à trouver. Je précise qu’il ne m’a pas dérangé, parce qu’il a eu l’intelligence d’être construit en dehors de tout groupe politique et de seulement défendre le féminisme.
Voilà donc pour cette lecture assez atypique dans sa construction, qui m’a ouvert des horizons qui m’étaient encore inconnus, en particulier pour ce qui est des mouvements d’actions féministes et de la découverte de femmes emblématiques qui mériteraient d’être bien mieux reconnues qu’en l’état actuel des choses. Bref, une belle réussite en ce mois de Mars pour le challenge Autrices du monde qui a participé à faire entendre la voix du peuple ukrainien !
La citation
Si nous souhaitons vivre une existence pacifique, on nous enjoint à suivre les règles, nous fondre dans la norme et aller dans le sens de la morale publique. Mais il ne peut y avoir de paix si les règles, les normes et la moralité que l’on nous oblige à respecter sont établies dans le but de nous opprimer. Nos esprits ne peuvent être en paix si les dieux qu’il nous est ordonné d’adorer nous forcent à rester silencieuses et obéissantes. Une existence pacifique ne peut être envisageable si nos corps sont estropiés, maltraités et violés par ces principes moraux.
Si nous parcourons le monde, comme nous le rappelle la suffragette Elizabeth Cady Stanton, nous constaterons que « toutes les religions qui ont existé sur terre ont avili les femmes », et je pense pouvoir aujourd’hui affirmer que les religions et le féminisme sont incompatibles. Là où les religions organisées prennent place, les droits des femmes se perdent. Là où commence l’influence religieuse, le féminisme prend fin. Cela ne veut pas dire que la foi et la spiritualité sont incompatibles avec la liberté des femmes et le féminisme. On peut être croyante et féministe, mais le féminisme ne peut être religieux. Vous ne pouvez pas exiger la liberté et les droits des femmes en les observant à travers un dogme sexiste. Le féminisme présuppose le droit inné des femmes à disposer de leur propre corps alors que les textes religieux et les institutions revendiquent la propriété des hommes sur le corps des femmes. Défendant farouchement la liberté de choix pour tous, je respecte le fait que quiconque ait le droit de choisir des idées conservatrices, des traditions sexistes, des vêtements, mais de là à les déguiser en symboles du progrès et du féminisme… Ne soyons pas hypocrites et respectons celles qui luttent pour se libérer de ces notions conservatrices. Dans le monde dans lequel les femmes aspirent à vivre, il n’y a pas d’avenir pour les religions monothéistes avec leurs dogmes et leurs traductions discriminantes. Ces institutions doivent se réformer, sans quoi de plus en plus d’entre nous se transformeront en sorcières.
Inna Shevchenko, Héroïques
Ma note
Le mot de la fin
Tu connaissais Inna Shevchenko et son rôle dans la lutte pour les droits des femmes ?
Amandine Stuart
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